AU COEUR DU MONDE, Par Stéphanie Mesnier-Angeli

 

     Si la presse française consacre en majorité ses gros titres à Lecornu 2 ("Gouvernement au forceps", "Et là, ça passe ?", "La dernière chance"), la presse internationale se concentre sur "le jour J". La vingtaine de derniers otages israéliens vivants devrait quitter l'enfer des tunnels après 2 ans de captivité. « Lorsque le courage rencontre la conviction, les miracles peuvent se produire », a déclaré à Tel-Aviv Steve Witkoff, l'émissaire de Trump. La foule a hué le nom de Netanyahou, mais acclamé en héros celui du président américain.

 

 

 

Le chemin sera long pour traiter traumatismes psychologiques et séquelles physiques (Die Presse). Et le chemin sera long vers la paix. « La guerre n'est pas terminée », a averti Trump (La Vanguardia). La trêve à Gaza et la libération des otages contre 2.000 prisonniers palestiniens n'est qu'une première étape. Reste à convaincre le Hamas, qui dirige Gaza depuis 18 ans, de rendre les armes. Et pour l'instant, c'est non (AFP). Trump veut aussi qu'Israël renonce à « une occupation permanente » de l'enclave. « Netanyahou est-il prêt à payer le prix d'un changement de sa coalition au pouvoir ? » (Le Figaro). Il va aussi falloir fournir les troupes d'une « force de stabilisation » pour éviter le chaos et les affrontements entre gangs rivaux à Gaza, et trouver 53Mds$, coût estimé par la Banque mondiale pour reconstruire (et encore, sans les dorures et le bling trumpien).

 

    Macron voulait un gouvernement avant son départ pour l'Égypte, où il participera, avec une vingtaine de chefs d'État, au "Sommet sur la paix" co-présidé par Donald Trump et le Maréchal al-Sissi. Selon le Jerusalem Post, « ni le Hamas (non convié) ni Israël ne participeront à la cérémonie de signature » de l’accord à Charm El-Cheikh. Le président français, qui ne cesse de répéter que Trump s'est inspiré de lui et que c'est la reconnaissance de l'État palestinien qui a tout déclenché, tient à être présent pour le souligner (Politico Bruxelles)

Macron a donc été exaucé. Lecornu 2 a accouché dans la douleur d'une équipe largement composée de ministres sortants et de quelques représentants de la société civile, tels Jean-Pierre Farandou, PDG de la SNCF nommé au Travail, ou Monique Barbut, ex-présidente du WWF et anti-nucléaire, nommée à l'Écologie. L'ex-ministre du Travail, Catherine Vautrin, devient ministre des Armées, sans rien connaitre à ce domaine, le préfet de police Laurent Nuñez succède à Retailleau place Beauvau. Borne et Valls ne sont pas reconduits.

Pour battre le record de durée de Lecornu 1, Lecornu 2 doit tenir la rampe jusqu'à midi. Mais personne ne donne cher de sa peau. Le RN et LFI ayant promis la censure, l'avenir de Lecornu 2 est entre les mains des 58 députés socialistes (10% de l'Assemblée), qui ne renonceront à la voter qu'en cas d'abogation de la réforme des retraites. Et Macron ne veut pas d'une nouvelle dissolution. Élu sur le dilemme "Moi ou le RN", il ne veut pas être le Président qui appelle Bardella à Matignon.

« atterrant » (Les Échos). « Quel naufrage. Macron continue de détruire la vie politique française depuis sa dissolution ratée de 2024 » (l'Opinion). En France comme en Europe, les critiques envers le chef de l'État sont acerbes. Macron  «pèche par orgueil. Il croyait être le seul rempart contre l’extrémisme. Mais aujourd’hui, il accentue la division du pays », estime Le Neue Zürcher Zeitung (Suisse) qui ajoute qu'il doit partir. La dette française est abyssale (3.300Mds€), les trois blocs (gauche, centristes et droite + RN) se neutralisent mutuellement et sont incapables de compromis, et plus aucune loi n'est votée, constate la Repubblica.

 

   Le Parisien se fait l'écho d'une enquête de la Défenseure des droits, Claire Hédon, sur « la galère des démarches en ligne ». À l'ère du tout-numérique, s'y retrouver est si compliqué qu'un quart des personnes abandonnent, préférant renoncer à leurs droits que de finir à l'asile. Quand rien ne fonctionne, 88% des Français tentent de contacter l'administration par téléphone, mais personne ne répond. Les personnes âgées, vivant seules, les ruraux et les familles précaires sont évidemment les premières victimes de cette jungle numérique. L'égalité d'accès aux services publics n'est donc plus assurée.

Le Parisien distille quelques conseils aux désespérés : se rendre dans une Maison France Services, se tourner vers le réseau associatif (par exemple l'OSAA, Organisation solidaire d'aides administratives), faire appel à Mon assistant numérique qui se déplace à domicile (mais là, c'est 40€ de l'heure après impôts), ou appeler la Défenseure des droits.

 

   Le pape Léon XIV s'est adressé aux journalistes : « Le monde a besoin d'une information libre, rigoureuse et objective. Dans ce contexte, il convient de rappeler l'avertissement d'Hannah Arendt :  «Le sujet idéal d'un régime totalitaire n'est ni le nazi convaincu ni le communiste convaincu, mais ceux pour qui la distinction entre fait et fiction, entre vrai et faux, n'existe plus » (Vatican).

 

   En Bref : Au Portugal, la droite a remporté les élections municipales. Elle dirigera Lisbonne, Porto, Sintra, Gaia et Cascais - C’est aujourd’hui que Nicolas Sarkozy connaitra la date et le lieu de son incarcération - Mesdames, jetez cette cigarette. Aujourd'hui, en France, le cancer du poumon tue plus de femmes que le cancer du sein (Le Parisien) - Douze femmes accusent de violences sexistes et sexuelles le couple de Thierry Lounas et Claire Bonnefoy, deux figures du ciné indépendant français (sociétés de production Capricci et Bobi Lux) - Après de longs débats, la justice vient de décider que les salariés en télétravail ont droit aux titres-restaurant, tout comme leurs collègues présents sur site - 5.000 mercenaires cubains combattent aux côtés des Russes en Ukraine (Reuters) - Les compagnies aériennes allemandes appellent à abattre les drones menaçant les aéroports - Un parapentiste et un passionné de raclette ont dégusté une raclette avec tous ses ingrédients tout en survolant le lac Léman : 15min de vol, une raclette chacun (20 Minutes). Boulotter du fromage plutôt que d'admirer le panorama ?...

Un avant-goût d'Opus 109, le nouvel album du pianiste Víkingur Ólafsson, avec un extrait de la sonate n°30 de Beethoven.

Stéphanie Mesnier-Angeli est journaliste, écrivain et romancière. 

Auteur entre autres de Barnabé - Le Roman d'un chat  (Librinova, 2021), Tueuses mais pas trop (Fayard, 2015).

Egalement co-auteur de livres politiques (avec Claude Angeli): Les Micros du Canard (Les Arènes, 2014), En basse campagne (Grasset, 2002), Chirac, père et fille (Grasset, 2000), Fort Chirac (Grasset, 1999), Sale Temps pour la République (Grasset, 1997), Le Nid de serpents: bataille pour l'Elysée 1993-1995 (Grasset, 1995), Notre allié Saddam (Orban, 1992).

Stéphanie Mesnier-Angeli est une contributrice du PRé  et livre aimablement cette Revue de presse depuis septembre 2024.