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C'EST LA SAINT BRUNO, Par Stéphanie Mesnier-Angeli


La REVUE DE PRESSE de Stéphanie Mesnier-Angeli


Plantu
Plantu

 

     L'accouchement fut long et pénible. Le bébé n'a pas bonne mine, et il n'est pas certain que le père passe la semaine.

Sur les 18 ministres du gouvernement Lecornu, 12 ont été reconduits, 4 sont de retour, 6 font leur entrée, dont 2 n'ont jamais été ministres. La seule surprise vient du "coucou me revoilà" de Bruno Lemaire, ex-ministre des Finances nommé aux Armées. Accusé d'avoir creusé la dette durant le Covid, il avait annoncé son « retrait de la vie politique »... l'an dernier. Ce retour inattendu cristallise les tensions chez les ministres LR, qui jurent n'avoir pas été mis au courant. «Hallucinant ! s'étrangle l'un d'eux dans Politico. Le Maire symbolise l'échec du macronisme ». Criant à la trahison, Bruno Retailleau convoque ce matin un "comité stratégique" et menace de se carapater, quand Rachida Dati, elle, s'accroche à son portefeuille et appelle à « ne pas se défiler ».

« Une équipe déjà en sursis » (Le Parisien). Si le RN qui a moqué « le radeau de la méduse », et LFI, qui voit « un cortège de revenants », votent la censure, c'en sera fini de ce gouvernement. «Y a-t-il quelqu'un pour piloter la France ? » (l'Opinion). En renonçant à l'usage de l'article 49.3, au motif de «contraindre les oppositions à prendre leurs responsabilités », Lecornu a fini de pointer le pistolet sur sa tempe. Mieux : « Céder au parlementarisme au moment où le parlementarisme démontre son inaptitude est une faute » (l'Opinion).

 

   Nos dirigeants seraient-ils hors sol, déconnectés des réalités ? L'affaire des "notes de frais des élus parisiens" fournit de sérieux indices. Hidalgo ayant toujours refusé de communiquer le détail de ses dépenses, il a fallu pas moins que plusieurs recours en justice, le travail de l'association "Transparence citoyenne" (financée en partie par Édouard Stérin) et une enquête de Mediapart puis de Libé pour en savoir plus. Le résultat est affligeant. Les élus parisiens dépensent sans se gêner l'argent du contribuable en « achats farfelus » (Libé) : fringues de luxe, pour soi ou les conjoints, achats de jouets pour les gamins, pressing, massages, maillots de bain, séjours à l'étranger, etc. La moins dépensière (parce qu'elle se sait sous surveillance, dit Libé) est Rachida Dati, suivie de Francis Szpiner. En tête de peloton, Hidalgo, qui dépense sans compter, talonnée par Jeanne d'Hauteserre (maire du VIIIè, LR), qui a eu l'outrecuidance de déclarer, sur BFM : « Je remercie tous nos concitoyens qui travaillent et qui nous permettent d'avoir ces indemnités, c'est quand même grâce à eux (...) J'aime être bien sapée, je suis une femme élégante ».

« Il n'y a pas d'abus. Tout ça est légal », s'est défendu Emmanuel Grégoire, adjoint PS à Hidalgo et qui ambitionne de lui succéder. Légal, d'utiliser l'argent public pour son usage personnel ? Moral, de servir le matin des repas à la Soupe populaire devant les photographes avant d'aller dépenser le soir 845€ au restaurant ?

Au-delà du mystère que constitue (pour moi) que l'on vote et revote pour des Hidalgo ou des Hauteserre, le train de vie de la Mairie de Paris, avec ses cabinets pléthoriques, ses conseillers en communication par centaines, ses missions et ses voyages bidons et sa dette abyssale, laisse songeur. Sans oublier la saleté de la ville et son mauvais entretien : l'indemnisation des victimes de chutes à cause de l'état des trottoirs coûte chaque année 440.000€.

 

   En pendant ce temps, l'extrême droite continue de progresser en Europe. En République tchèque, le populiste milliardaire de droite Andrej Babis, poursuivi pour fraude, a fait un triomphe aux législatives. Admirateur de Trump, Babis a promis de « réduire le soutien à l'Ukraine » et souhaite « un rapprochement avec la Hongrie et la Slovaquie », pro-russes, tout en se disant « pro-européen et pro-Otan » (Huff Post, Die Welt).

L'extrême droite est en tête de tous les sondages, en France, au Royaume-Uni, en Allemagne, au Portugal... Puissante en République tchèque, en Roumanie, en Pologne, sans que cela ne provoque le moindre questionnement chez nos gouvernants qui, peau de saucisson sur les yeux, foncent dans le mur.

 

   En Égypte, les négociations pour la mise en place du plan Trump à Gaza ont commencé, sous la houlette de Steve Witkoff et de Jared Kushner (le gendre). Même si le Hamas a fini par accepter certains points clés (un "oui, mais"), « le diable se cache dans les détails » (Le Figaro). En échange de la vingtaine d'otages israéliens encore en vie, des 30 dépouilles de ceux qui sont morts et de son retrait de Gaza, Israël devra libérer « des milliers de prisonniers palestiniens, dont 250 condamnés à perpétuité ». Parmi eux, Marwan Barghouti (Fatah), Ahmed Saadat (FPLP) et d'anciens chefs militaires du Hamas. L'Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas voit d'un très mauvais œil la libération de certains prisonniers, en particulier Barghouti.

Au centre du jeu, le Qatar, son argent, ses financements, ses cadeaux. En échange de son entregent, Trump a signé avec l'émir un accord de défense qui engage Washington à prendre « toutes les mesures, y compris militaires », pour défendre le Qatar (Axios, CNN).

 

   En Bref : Antoni Lallican, talentueux photojournaliste français, a été tué en Ukraine par un drone russe - Le député LFI Manuel Bompard a démenti que son collègue Thomas Portes se soit incliné au Liban sur les tombes des terroristes tueurs d'athlètes israéliens aux JO de Munich, arguant qu'il avait seulement « visité un cimetière ». C'était sans compter sur la bêtise de Portes, qui avait publié sur les réseaux des photos de son émouvant pèlerinage - Pour le Tagesspiegel, l'Europe devient « un refuge pour le Hamas" et « la principale menace terroriste pour les Juifs en Europe » - Au Maroc, la répression contre les jeunes qui se mobilisent contre la corruption et l'autoritarisme du régime a fait « plusieurs dizaines de morts » - Trump estime que s'il n'obtient pas son prix Nobel de la paix, c'est que « le jury est incompétent ». Bien sûr... - Victime d'une campagne de haine le qualifiant de « sioniste » parce que sa femme est juive, Robbie Williams a vu son concert annulé en Turquie pour des « raisons de sécurité » - À la Une du New York Post, Zohran Mamdani, candidat démocrate la mairie de New York, s'affiche, radieux, en compagnie de l'Ougandaise Rebecca Kadaga, qui réclame la prison à vie pour tous les homosexuels. Monde de dingues...

Dans la lumière froide du matin, Diana Ross refuse de regarder l'amour mourir...


Stéphanie Mesnier-Angeli est journaliste, écrivain et romancière. 

Auteur entre autres de Barnabé - Le Roman d'un chat  (Librinova, 2021), Tueuses mais pas trop (Fayard, 2015).

Egalement co-auteur de livres politiques (avec Claude Angeli): Les Micros du Canard (Les Arènes, 2014), En basse campagne (Grasset, 2002), Chirac, père et fille (Grasset, 2000), Fort Chirac (Grasset, 1999), Sale Temps pour la République (Grasset, 1997), Le Nid de serpents: bataille pour l'Elysée 1993-1995 (Grasset, 1995), Notre allié Saddam (Orban, 1992).

Stéphanie Mesnier-Angeli est une contributrice du PRé  et livre aimablement cette Revue de presse depuis septembre 2024.

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