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BRUNO LATOUR, PENSEUR DE LA CRISE CLIMATIQUE, par Timothy Adès, poète traducteur

 

   Bruno LATOUR serait, dit-on, le philosophe français contemporain le plus célèbre et le moins compris. En France particulièrement où l’on ne goûtait guère, semble-t-il, son côté « touche à tout ». Sociologue, philosophe ou anthropologue ? Reconnu par ses pairs à l’étranger (honoré de sept doctorats honoris causa et de prix académiques aussi prestigieux que le prix Holberg en 2013 - considéré comme le Nobel des sciences sociales et humanistes - et le prix de Kyoto en 2021), jouissant d'une forte notoriété dans le monde académique anglophone, très connu aux Etats-Unis, plusieurs de ses thèmes avaient fini par se populariser en France grâce à quelques médias publics : "les modes d’existence", "le Parlement des choses", "le terrestre"…

Surtout depuis qu’il avait entrepris de retourner enquêter sur le terrain, à l’occasion du " mouvement des Gilets jaunes ", dans deux villages du centre de la France : La Châtre (Indre) et Saint-Junien (Haute Vienne).

 

Poète-traducteur anglais, j’apprends qu’il vient de nous quitter : jusqu’ici, je ne savais rien ou pas grand-chose de son oeuvre, si ce n’est ce que la production du PRé m’en a donné à saisir à la faveur de quelques articles ou des rapports d’orientation annuels. Ou ce que nous en ont dit cette semaine le sociologue politiste Philippe Corcuff et le spécialiste en communication Jean-Marie Pierlot, deux contributeurs précieux du PRé.

Sa pensée écolo-sociale, son approche pluridisciplinaire, son refus des généralités entrant en correspondance avec les orientations et la démarche pragmatiste de notre groupe de réflexions sociales et politiques, social-écologiste.

 

Aussi, je vous invite, mes amis, mes semblables, à nous régaler de vos commentaires…

Avait-il raison ? Comment réagir face au dérèglement climatique et à la perte de la diversité de la vie sur la Terre ?

 

Bruno Latour admire les termites, qui ne dépouillent pas la terre, qui consomment peu, qui utilisent leurs déchets en les recyclant. Il veut que la société humaine soit pareille, qu’on évite l’égotisme, qu’on fasse des liaisons, qu’on entremêle. Il revendique ‘un nouveau régime climatique qui propose l’alignement de la justice sociale avec la crise écologique, et qui préfère à l’intérêt immédiat la survie à long-terme’.

 

De souche viticole bourguignonne (fils de la Maison de vin Louis Latour), il va à l’école St-Louis de Gonzague. Jeune, à Abidjan, il constate que les entreprises françaises avaient mal à trouver de cadres locaux. C’était qu’on ne leur avait enseigné que des théories : donc, ils ne comprenaient pas les dessins techniques : ‘l’esprit prémoderne de l’africain’ disait-on : un racisme pseudo-scientifique.

 

   Dans son livre Où atterrir ? il note que les crises de migration, de l’inégalité, de l’environnement, souffrent tous ensemble d’une politique de dénégation. Dans Mémo sur la nouvelle classe écologique il dit que la nouvelle lutte des classes est l’écologie, et que les amateurs de la croissance y ont tort : qu’ils auraient dû apprendre que la croissance par le gaz, le charbon, le pétrole n’est qu’une ‘trahison’.

 

Son espoir : que les humains parviennent à vivre en accord avec eux-mêmes et la planète, sans les exploiter. ‘Le virus nous enseigne,’ a-t-il dit : ‘en passant de bouche à bouche, on viralise très vite le monde. Cette connaissance peut nous rendre puissants.’


Timothy Adès est un poète traducteur-britannique, spécialiste de la versification, des rimes et des mètres, en français, espagnol, allemand et grec. Fin connaisseur, entre autres, de Victor Hugo, Robert Desnos, Jean Cassou, Guillaume Apollinaire, Georges Pérec, Gérard de Nerval, Louise Labé, de Federico García Lorca, d'Alberto Arvelo Torrealba, d'Alfonso Reyes, de Bertold Brecht, Hermann Hesse, Heinrich Heine et d'Angelos Sikelianos. Il a aussi réécrit les Sonnets de Shakespeare en évitant la lettre e et a écrit une longue poésie n’utilisant aucune voyelle, sauf le e.

"Ambassadeur" de la culture et de la littérature française, il est le premier à avoir traduit les "Chantefables" de Robert Desnos en anglais. Lauréat des Prix John Dryden et TLS Premio Valle-Inclán.

Timothy Adès est membre du conseil scientifique du PRé, co-animateur de la rubrique "Tutti Frutti " (chroniques et rendez-vous culturels, poétiques, éco-gastrosophiques, pour « cueillir le jour » au sens du fameux carpe diem emprunté au poète latin Horace. Au gré des envies et des propositions des uns et des autres. Publiés généralement le week-end).

Derniers ouvrages parus : " Alfonso Reyes, Miracle of Mexico " (Shearsman Books, 2019). Bilingual Spanish/English, "Robert Desnos, Surrealist, Lover, Resistant " (Arc Publications, 2017) : 527 pages, bilingual text, les poèmes de Desnos avec les versions de Timothy Adès.

 

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Commentaires: 1
  • #1

    Timothy Adès (mardi, 18 octobre 2022 15:47)

    Merci... le premier tiers n'est pas de ma main !