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POUR UN CABINET DE CONSEIL INTERNE A L'ETAT, par Patrick Pilcer, Conseil et Expert sur les Marchés Financiers

       Conférence de presse des ministres Amélie de Montchalin et Olivier Dussopt sur les cabinets de conseil - Photo AFP

    Il y a plusieurs mois déjà, le choix du gouvernement d’Edouard Philippe de recourir au cabinet McKinsey pour établir un plan anti-Covid avait fait grand bruit. Nous nous en étions fortement émus dans une chronique à l’époque. Comme par hasard, ce dossier ressort ces derniers jours, à la veille des élections présidentielles. Les opposants au Président Macron n’en avait guère parlé à l’époque, et aujourd’hui, ils y vont tous de leur refrain contre les cabinets de conseil. Même les partisans des coupes drastiques dans la fonction publique s’offusquent du recours aux cabinets privés. Sans parler des jaloux pour qui l’autre gagne toujours trop.

 

Pourtant, tous, de la Mairie de Paris à la Région Ile de France, de LFI à Reconquête, utilisent des cabinets de conseil extérieurs, souvent les mêmes que ceux que l’Etat utilisent.

 

Il est surprenant, voire choquant, que McKinsey ne paie pas d’impôt en France, mais cela n’est pas dépendant d’une décision du gouvernement ou du président, et le fisc puis la justice feront leur travail. Qu’au nom de la fameuse Souveraineté Nationale, l’Etat ne privilégie pas des cabinets français interroge également.

 

Ce qui me choque, me surprend, par contre, est qu’aucun candidat ne propose une solution plus pérenne, une sortie par le haut.

 

Que l’administration utilise des prestataires extérieurs sur des tâches techniques non récurrentes est compréhensible, mais pourquoi l’Etat fait-il appel à des cabinets de conseil en stratégie alors que la France dispose, contrairement à d’autres pays, de Grands Corps, Corps des Mines, Corps des Ponts, Corps de l’Insee, Cour des Comptes, Inspection des Finances, etc… Ces corps disposent des meilleurs cerveaux de notre pays, cerveaux que les cabinets américains s’arrachent à prix d’or dès qu’ils le peuvent. Les ministres n’ont-ils pas confiance dans leurs hauts fonctionnaires ? ont-ils plus confiance dans d’anciens hauts fonctionnaires à présent dans des cabinets privés ? cherche-t-on à dégouter les jeunes hauts fonctionnaires du service de l’Etat ? étonnant !

 

Ou alors, il s’agit d’un problème d’organisation. Il ne serait pas impossible que, comme dans les grands groupes privés, le travail en silo crée des baronnies qui empêchent des missions communes de réflexion stratégique. Mais alors, plutôt que de ne plus utiliser les Corps, il faut faire comme dans les grands groupes privés les plus performants, et mettre en place un cabinet de conseil interne, une task force, qui utilise le vivier des talents de nos hauts fonctionnaires, un vivier exceptionnel qui plus est, et qui monte des missions de réflexion stratégique de haut niveau, de courte, moyenne ou longue durée, et à coût nul pour le contribuable.

 

    On pourra ainsi sortir par le haut de cette situation ubuesque où l’Etat paie très cher à l’extérieur des talents dont il dispose en son sein. Et pas besoin de mandater McKinsey pour cela !

 

 

Remerciements à OPINION Internationale qui a publié l'article sous le titre "Affaire McKinsey : pour un cabinet de conseil interne à l’Etat ! La chronique de Patrick Pilcer"  (01-04-2022)  Opinion Internationale - S'informer pour s'engager.



Patrick Pilcer, ingénieur civil des Ponts et Chaussées, diplômé et membre de la SFAF, (Société française des analystes financiers) est Conseil et Expert sur les Marchés Financiers. Fondateur de PILCER & ASSOCIES début 2009, expert près la Cour d'Appel de Paris. Il débute en 1990 à la CPR (Compagnie parisienne de réescompte) au département recherche et développement avant de rejoindre New-York comme arbitragiste sur la courbe de taux US. Responsable des activités Obligations Convertibles, successivement à la CPR (1992-1995), au Crédit Lyonnais (1995-2001), puis chez Natixis (2001-2006), où il crée et gère un portefeuille Market neutral jusqu'à fin 2008.

Patrick Pilcer est par ailleurs secrétaire général de "Vaincre le Cancer", association pour le financement de la recherche contre le cancer.

Dernière contribution :

https://www.pourunerepubliqueecologique.org/2020/04/06/le-dividende-c-est-mal-par-patrick-pilcer/


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Commentaires: 3
  • #1

    Dominique LEVEQUE (jeudi, 07 avril 2022 15:13)

    Voir aussi :
    https://theconversation.com/depenses-manque-de-transparence-pourquoi-le-recours-aux-cabinets-de-conseil-est-si-impopulaire-180805

    sous licence Creative Commons

  • #2

    jeannaem@hotmail.fr (jeudi, 07 avril 2022 21:57)

    Non ! Le conseil est une activité externe, sinon cela s'appelle du support ! La position du consultant est celle de l'observateur. Arrêtons simplement le recours aux Anglo-saxons et faisons la promotion de nos savoir faire !

  • #3

    Patrick Pilcer (vendredi, 08 avril 2022 08:51)

    le conseil n'est pas uniquement externe, la plupart des groupes modernes ont leur task force adaptée pour se passer des cabinets externes quand ils le peuvent. C'est un changement net par rapport aux pratiques des années 80/90/2000. le problème n'est pas tant la nationalité du cabinet de conseil, mais de demander à quelqu'un de nous donner l'heure qui se trouve sur la montre à notre poignée! beaucoup d'entre nous ont eu des expériences avec ces cabinets "externes" dont le but est souvent de faire passer le message de la direction autrement. Une expérience personnelle, dans un grand groupe le DG en arrivant demande à un cabinet dont le nom pourrait commencer par M une étude de stratégie, à prix d'or. L'implémentation de leurs recommandations ne change pas grand chose à l'activité du groupe. 3 années après, ce DG se retrouve à la tête d'un autre grand groupe dans le même secteur mais avec une culture, un positionnement, des clients, différents. Il demande à ce même cabinet une étude de stratégie, à un prix encore plus élevé. Le cabinet ressort la même étude en changeant les logos et noms! Cela n'a pas contribué à grand chose. Cela s'est su et ce DG est parti en retraite avec une belle prime plus tôt que prévu...