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THE WORLD OF TOMORROW, BUT TODAY, par Philippe T Georgel, Professeur en biochimie et biologie moléculaire (Université Marshall, Etats-Unis)


PHILIPPE T GEORGEL : " D'UN POINT DE VUE ECOLOGIQUE, LA CRISE DE LA COVID-19 LAISSERA AUSSI ET MALHEUREUSEMENT SA MARQUE SUR NOTRE ENVIRONNEMENT "

 

Philippe T Georgel nous livre ici non pas un article scientifique, mais son sentiment personnel sur la crise de la Covid-19, ce qu'elle nous dit de nos sociétés et des Hommes, son espérance pour l'après, c'est-à-dire pour aujourd'hui.


 

La COVID-19, c'est… Bon sang, pourquoi nous ? Pourquoi maintenant? Chaque jour, je maudis ce virus qui a décidé que le monde n'était pas assez chaotique, que nous avions besoin d'un fléau supplémentaire pour rendre nos vies plus malheureuses.

 

Mentionner les fléaux évoque à première vue les maladies politiques endémiques, la cupidité et le sentiment du « tout m'est dû ». Comme c'est souvent le cas, les crises ont tendance à mettre au premier plan le meilleur et le pire de l'humanité. D'une part, l’action d’individus qui tentent de contribuer positivement, fabriquant des masques, se portant volontaires pour rejoindre le personnel médical, et même faisant des dons financiers. D'un autre côté, nous avons pu observer aux Etats-Unis des manifestations spectaculaires pour mettre fin à la distanciation physique avec des individus investissant les bâtiments publics, vêtus de tenues de camouflage et, comme si cela était nécessaire, armés d'armes automatiques (l'un de ces «patriotes» est même allé jusqu'à apporter un lance-roquettes pour manifester son soutien).

 

 

 

 

 

Lumière et couleur (la théorie de Goethe) de William Turner, 1843

 

Juste pour nous assurer que nous nous comprenons, pensez-vous que la COVID 19 est vulnérable aux armes automatiques ?

 

Et puis, comme en France, nous avons également connu une controverse sur les masques. Mais de manière plus surprenante, il s’agissait pour certains de considérer, le fait que de devoir porter une protection individuelle était une atteinte à leurs droits en tant que citoyen et à leur liberté…

Opinion personnelle : Je trouve qu'un masque est une méthode de prévention et de protection beaucoup plus efficace que votre fusil automatique. Peut-être est-ce ma formation de scientifique et mes souvenirs de cours de virologie que j'ai suivis il y a des années. Peut-être que pour mieux comprendre votre état d'esprit, je devrais commencer un régime alimentaire à base d'eau de Javel et de gel hydro-alcoolique. Cela résoudrait probablement tous mes problèmes, et très probablement de manière définitive. Cela m'amène à boucler la boucle sur cette question : les « maladies politiques ».

 

Je vis aux États-Unis. Pour le meilleur et pour le pire, j'y habite depuis 32 ans. Je l'ai vu politiquement faire le yo-yo, être à la fois un lieu de brassage et d'intégration, mais aussi revenir à des heures sombres et afficher un manque de civilité qui s’aggrave (en lien avec les médias électroniques). Pour être juste, il faut admettre que les États-Unis ne sont pas un cas unique et l’on retrouve cette tendance un peu partout sur la planète.

 

Maintenant, superposez cette approche nombriliste croissante à la vie avec une crise sanitaire internationale, et observez les sentiments nationalistes sortir des marges politiques. Extrémistes, libertariens (au sens américain du terme) de toutes formes et couleurs vous diront désormais que la raison de la COVID-19, c’est l’ «AUTRE».

 

Nous pouvons maintenant jouer au « jeu des reproches » en toute impunité, car il est évident que l’ «AUTRE» doit être responsable. Ceux qui portent des masques poussent, en toute logique, leur programme politique libéral qui consiste à sauver…les baleines, la chouette tachetée ou autres. D'un autre côté, les groupes refusant de se conformer à l'utilisation de masques ou d'autres mesures préventives veulent s'assurer que leur liberté est préservée.

La question devient: à qui la liberté et la liberté de faire quoi?

De mourir quand vous le désirez ? Certes c’est votre choix. Cependant, je peux avoir un léger problème lorsque votre décision d'être infecté par la COVID-19 et d'y succomber affectera toutes les personnes qui vous entourent: votre famille, vos amis et les passants innocents. Votre liberté, de mourir quand vous le souhaitez, empiète sur la liberté des AUTRES de décider qu’ils préfèrent vivre et de NE PAS propager une maladie potentiellement mortelle dans mon environnement immédiat ou étendu. Mais pour garder mon argument, ce qui importe : c’est l’autre le problème initial.

 

Alors, en tant qu’espèce humaine, que décidons-nous de faire?

 

Se concentrer sur nous-mêmes au niveau le plus individuel ou considérer qu'il pourrait y avoir un spectre plus large à envisager ? Il y a probablement un « entre deux » à trouver. Mais face à la réalité, nous sommes et serons tous affectés directement ou indirectement par ce fléau moderne.

La prochaine ou les deux prochaines années seront difficiles avec un certain nombre d’inconnues. Allons-nous utiliser ce défi comme un levier pour une meilleure appréhension des choses ou allons-nous plutôt nous aventurer plus profondément dans la suffisance? J’ose espérer que le bon sens et la logique prévaudront, mais chaque jour les événements me font perdre un peu confiance en la civilité et notre volonté globale de comprendre les AUTRES. Nous sommes tous sur le même bateau / la même planète, et si nous le perdons, nous coulons et nous noierons tous.

 

Ce que je confie là, soyons clairs, n’est évidemment qu’une opinion et rien que cela. Ces dernières années ont donné naissance au concept de «fake news», un concept qui a été véhiculé et amplifié par une utilisation bien orchestrée de l'Internet et a été développé comme un puissant outil politique. Ayant enseigné des cours identifiés comme «pensée critique», j'ai passé des années à essayer de faire en sorte que les étudiants développent la capacité de différencier des faits, des faits scientifiques, d'opinions.

Les faits scientifiques s'étendent de la recherche, qui peut prendre des années à générer, qui peut être vérifiée, qui a été évaluée par des pairs et devrait être reproductible. Les opinions peuvent être générées spontanément, peuvent n’être fondées sur aucun fait, n'ont pas besoin d'être vérifiées et proviennent de sources qui n'impliquent aucune sorte de pensée critique.

La désinformation peut être fabriquée pour s'adapter à tout programme spécifique. La COVID-19 a été la source d'une énorme quantité d'informations, réelles ou non, circulant sur l’Internet (FacebookTM and TwiterTM), allant de la revue scientifique par des pairs à des déclarations soutenant l'utilisation de plantes pour prévenir l'infection par la COVID-19 ou même en utilisant de l'eau de Javel et / ou un traitement gel hydro alcoolique comme remède (sources Maison Blanche). Tout cela fait partie de notre monde actuel, la COVID-19 génère comportements indisciplinés et fausses nouvelles.

 

MAIS: J'ai choisi mon camp, je ferai de mon mieux pour rester informé, je ne serai pas gêné, je porterai un masque en cas de besoin, je ne pourrai pas prendre mon verre habituel avec mes amis quand je le souhaiterai.

Je vais probablement subir des conséquences financières (réduction de salaire, je souhaite éviter une perte complète d'emploi comme beaucoup ont eu et auront à le subir). Mais j'essaierai également de faire en sorte que les «AUTRES», qui, sans aucun reproche, subissent des conséquences bien pires que mes inconvénients mineurs, soient soutenus et protégés. Je veux m'assurer de continuer à prendre soin d'eux, directement et indirectement.

 

D'un point de vue écologique, la crise de la COVID-19 laissera aussi et malheureusement sa marque sur notre environnement.

L'utilisation d'équipements de protection individuelle, en plus d'affecter l'état de santé de la population en général, a déjà commencé à avoir un impact sur notre écosystème. Un grand nombre de masques flottants ont été repérés dans nos voies d'eau et nos mers et océans. Les gants à usage unique suivent la même tendance… L'avantage écologique temporaire des politiques «stay at home» et de quarantaine sur la qualité globale de l'air dans les zones urbaines a été presque immédiatement contrebalancé par l'augmentation négligente de l'élimination de divers éléments à base de plastique. Étant donné que les exigences du masque, ou son utilisation suggérée, devraient durer pendant une période prolongée (et qu'en dépit du refus d'une personne de bénéficier de ses avantages), je me demande comment divers gouvernements vont aborder et éventuellement réglementer l'élimination des gants et des masques.

 

En conclusion, il semble que, une fois de plus, notre propre sort soit entre nos mains, fortement tributaire de la science, de notre sens du devoir civique, du respect d'autrui et de notre environnement naturel.

Pourrons-nous passer ce test ?

 

Avertissement: Ce document est basé sur mon opinion personnelle et ma perception du monde. N'hésitez pas à critiquer !

 

N.B : Traduction en Français du texte original en anglais : Stanislas Hubert avec la collaboration de Dominique Lévèque et l'accord de l'auteur.

 


 

 

Philippe T Georgel, Ph.D, est Professeur en biochimie et biologie moléculaire à l'Université Marshall (Huntington en Virginie-Occidentale, Etats-Unis) dans le Département des sciences biologiques, Bâtiment de biotechnologie Byrd.

Il est aussi Président de l’Assemblée des enseignants de Marshall University.

Ses recherches portent plus particulièrement sur la régulation épigénétique de l’expression génique.

Il est l'auteur d'un article scientifique " Potential Health Risks Linked to Emerging Contaminants in Major Rivers and Treated Waters ",  sur la présence de perturbateurs endocriniens et de la buprénorphine (un opioïde) dans les cours d'eau locaux et la menace croissante qu'ils constituent pour les populations, avec James Kessler, Diane Dawley, Daniel Crow, Ramin Garmany, publié le 11 janvier 2020 sur le site du PRé.

Philippe T Georgel est membre du conseil scientifique du PRé.

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THE WORLD OF TOMORROW, BUT TODAY, by Philippe T Georgel, PhD, Professor, Department of Biological Sciences (Marshall University)
Original English text
The world of Tomorrow, but Today by Phil
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