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Dîner-débat avec Gabriel Cohn-Bendit

Gabriel Cohn-Bendit était, le 9 février 2011, l’invité du Pré dans le cadre de ses diners-débats.

 

Comment doter l’écologie politique d’une culture politique de gouvernement ? Quelles nouvelles formes de militantisme et d'engagement ?

 

Quelle place pour l'écologie politique dans le débat présidentiel ?

 

Tels étaient les questionnements sur lesquels le Président des « Amis d’Europe Ecologie » était amené à donner son point de vue et à débattre avec nous.

 

« Itinéraire d’un écolo »

 

Dans une forme éblouissante et avec un ton très facétieux, Gabriel Cohn-Bendit est tout d’abord revenu sur son long parcours associatif et politique. Se définissant comme « un intermittent du spectacle politique », il rappelle avoir eu beaucoup de cartes de partis, mais tout autant de mal à les garder. Parti Communiste en 56, « socialisme ou barbarie », PSU,… Il franchit le rubicond de l’écologie en 1974, en appelant à voter René Dumont et plus tard participe à la création de Génération Ecologie quand Brice Lalonde était ministre de Michel Rocard.

 

Il rappelle au passage qu’en 1992, aux élections régionales, le score des verts additionné à celui de génération écologie représentait près de 15%. Ce qui permet, selon lui, de relativiser le bon score d’EELV, lors des récents scrutins.

 

En 1997, il entre chez les Verts et œuvre pour que Dany Cohn-Bendit devienne tête de liste à l’occasion des européennes en 1999. Il déplore au lendemain des élections la volonté de l’appareil du parti de marginaliser son frère.

 

Puis vient 2008 et la campagne des européennes, où explique Gabriel Cohn-Bendit, il était question, non pas d’ouvrir des listes d’Europe Ecologie à des non-verts mais d’ouvrir des listes de représentants de la société civile à des Verts….inversion des principes pour le moins rafraîchissant.

 

Europe écologie : une nouvelle façon de faire de la politique ?

 

Le résultat d’Europe Ecologie aux européennes suscite alors un vif espoir. Il escomptait que cette dynamique permette l’invention d’une nouvelle manière de faire de la politique en s’appuyant notamment sur la « coopérative politique » qu’il a contribué à mettre en œuvre au lendemain des élections et que les Verts ont encore aujourd’hui, du mal à intégrer.

 

Les partis sont une forme périmée de la vie politique. Selon lui, les divergences de courants sont souvent factices et servent de prétextes à des concurrences d’écurie et il va jusqu’à penser que certains sont prêts à espérer la défaite de la gauche aux présidentielles pour conserver lors des élections suivantes leurs bases d’élus et de notables locaux.

 

Rien dans l’appareil des partis n’est adapté à la vie de la cité d’aujourd’hui : Ni les réunions dont le fonctionnement devrait être optimisé par les nouvelles technologies, ni la figure du militant dévoué que les partis s’acharnent à glorifier, ni les procédures de désignation et de représentation qui devraient permettre de se délester des « tueurs » et des « démagos » (par exemple avec la promotion du tirage au sort)

 

Bref, Europe Ecologie avait la possibilité d’évacuer les perversités de la vie politique mais n’a pas su ou n’a pas voulu profiter de l’occasion qui lui était offerte.

 

Les écologistes et la présidentielle de 2012 : pour une candidature unique de l’opposition

 

Gabriel Cohn-Bendit a toujours plaidé pour faire de l’écologie une force politique autonome. Il prône ainsi pour toutes les élections, qu'elles soient municipales ou régionales, des listes écolos au premier tour, car ce sont des scrutins proportionnels à deux tours qui permettent de constituer des listes majoritaires au deuxième tour en tenant compte de la volonté des citoyens. Néanmoins, se considérant comme un « traumatisé de 2002 », il met l’accent sur la particularité du scrutin présidentiel qui, ne donnera aucune chance à un candidat écolo d’apparaitre au second tour et qui par contre peut empêcher un candidat socialiste d’y arriver, avec comme conséquence le remake de 2002, un duel droite-extrême droite au second tour.

 

Cela ne signifierait pas qu’ EELV n’aurait aucun rôle à jouer dans ces élections car :

 

-Nicolas Hulot a, en 2007, démontré avec son pacte écologique que l’on pouvait être plus utile à l’extérieur qu’en tant qu’acteur du jeu électoral.

 

-« Le paradigme gauche-droite » est dit-il « un paradigme de faignant » et se pose la question de fédérer les oppositions à Nicolas Sarkozy.

 

Dans une lettre à Dominique Strauss-Kahn[1] qu’il considère comme le meilleur candidat à gauche susceptible de gagner les présidentielles, il appelle l’actuel Président du FMI à négocier avec les écolos sur la base suivante :

 

1. l’introduction d’une dose de proportionnelle, par exemple 200 députés sur les 600, ce qui sur la base de 15% pourrait permettre à EELV d’avoir 30 députés.

 

2. Reprendre l’idée proposée par Nicolas Hulot d’un ministère de l’Ecologie regroupant énergie, mer, agriculture, transports.

 

3. Reprendre comme minimum programmatique ce qui avait été obtenu lors du Grenelle de l’environnement et abandonné ensuite.

 

Les discussions ont bien sur permis de faire apparaitre quelques divergences (notamment sur la laïcité et l’éducation…) entre Gaby "l’écolo-libertaire" et les "écolos-républicains" sympathisants ou adhérents du Pré, mais aussi, plus surprenant, de nombreux de points d’accords.

 

En matière de culture de gouvernement, Gaby Cohn-Bendit considère qu’il ne faut pas avoir peur du pouvoir ni de «mettre les mains dans le cambouis ». A la question de savoir comment concilier la culture pacifique des mouvements verts avec une culture de gouvernement nécessitant une politique de défense pragmatique, Gaby Cohn-Bendit rappelle comment par exemple son frère a du aller défendre l’intervention européenne au Kosovo devant des assemblées pacifistes en Allemagne.

 

Tous convergent aussi vers l’idée que les partis politiques doivent davantage s’imprégner du local et des préoccupations concrètes, s’ouvrir au secteur associatif, s’ouvrir tout court, mais doivent aussi, pour gérer "l’agora permanente", trouver une forme d’organisation pour éviter l’écueil de la manipulation.

 

Le consensus se fait également autour de la nécessité de rapprocher des questions environnementales de la réalité sociale et ce, afin que les citoyens se sentent davantage concerner par la chose publique.

 

A ce titre, le Pré et la « coopérative politique » qu’appelle de ses vœux Gaby, partagent sans nul doute une vision commune du débat public.

 

 

 

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